Bonaventure Djonkep : « former les jeunes pour qu’ils s’épanouissent »





Après avoir presque tout gagné sur le plan local, en tant qu’entraineur, Bonaventure Djonkep se consacre désormais à la formation. L’ancien Lion Indomptable du Cameroun veut former les jeunes joueurs afin d’assurer la relève qualitative dans le football camerounais. Il a lancé le centre de formation « Relief Football Club » qui s’occupe des jeunes âgés de 9 à 19 ans. C’est lors d’une séance d’entrainement au stade du Génie militaire de Douala que nous l’avons rencontré et il a bien voulu nous en dire plus sur sa reconversion.

Vous êtes l’un des entraineurs camerounais les plus titrés du pays, mais aujourd’hui vous avez décidé de vous lancer dans la formation. Qu’est-ce qui a motivé cette décision que vous avez prise ?

Je pense que j’ai fait mon parcours et aujourd’hui, je me tourne vers la jeunesse parce que j’estime que notre football est en train de régresser. J’ai eu la chance de voir jouer des grands attaquants comme Doga, Roger Milla, Mbep Pierre, Emana Marcous, Charles Lea Eyoum, des attaquants qui étaient de très bons dribbleurs, de très bons passeurs et buteurs et aujourd’hui, je me dis que comme on n’a plus de joueurs de cette race, moi-même, je peux en fabriquer. Ça me motive de descendre sur le terrain avec des jeunes pour en créer.

Lorsqu’on a été habitué avec les séniors, est-ce que ça se passe bien avec les jeunes ?

Avec les jeunes, certes c’est passionnant mais c’est difficile parce qu’il faut qu’ils aillent d’abord à l’école et nous tenons à ce qu’ils y aillent d’abord. Vous avez vu qu’ils viennent au petit trot, au petits pas. Mais l’objectif est qu’on les amène à allier foot et instructions à l’école comme moi-même j’ai fait. Vous savez, j’ai eu mon bac en 1980 et puis, je suis allé à l’INJS. Donc, je suis un des rares qui aient pu allier le football et l’école, aujourd’hui, je souhaite vraiment faire en sorte que ces enfants profitent de mon expérience.

Comment se fait le recrutement à Relief football Center ?

Pour le moment, on n’a pas de conditions draconiennes. Lorsque l’enfant vient, on regarde s’il a le talent et on le recrute s’il respecte les normes. La norme c’est un certain nombre de frais qu’il faut payer pour avoir les équipements, pour avoir le site et avoir l’assurance pour exercer.

Actuellement, vous êtes seulement dans le football masculin mais est-ce que vous ne pensez pas à l’avenir vous lancer dans le football féminin aussi ?

Si ! On pense non seulement à former des femmes aussi mais former même des éducateurs. Je profite pour vous annoncer que du 10 au 14 décembre, nous avons un séminaire ici (Génie militaire, NDLR) pour former des éducateurs, former des footballeurs et tout le monde afin que notre pays retrouve sa gloire d’antan.

Est-ce que cela veut dire que si un club vous sollicitait actuellement pour l’Elite One, vous déclineriez l’offre ?

Pour le moment, vraiment, la jeunesse me passionne et je souhaite me consacrer à cela.

Pourquoi avoir choisi le nom « Relief Football Center » ?

C’est la relève ! Relief, c’est la relève (en anglais, NDLR). Vivement que cette relève se fasse dans de bonnes conditions.

Où prenez-vous les moyens pour mener cette activité ?

Dire que j’ai les moyens, c’est trop dire mais je me bats avec des amis. J’ai des amis à l’étranger qui vont venir ici au pays pour le séminaire, à l’instar de Kingue Hermann, Nyamsi Tobbo, Simo Augustine. Ils vont venir pour qu’ensemble on réfléchisse parce qu’eux, ils ont l’expérience de l’étranger. Kingue et Tobbo sont au Canada tandis que Simo est en Suisse. Donc, ils vont nous aider à trouver des partenaires, à trouver des gens avec qui on peut travailler.

En dehors du Génie militaire, avez-vous d’autres sites où vous formez ces jeunes ?

On a déjà le Génie, ce n’est pas évident. Vous voyez les conditions dans lesquelles nous travaillons, vous voyez l’espace, c’est vraiment idéal. Mais dans un certain nombre de temps, nous pensons  nous mettre dans notre propre site mais ce n’est pas pour tout de suite.

C’est quoi véritablement le projet ? Simplement former la jeunesse et la mettre au service d’autres clubs ou alors, il y a l’ambition demain d’avoir une équipe première ?

Je ne souhaite pas avoir une équipe première, je souhaite former les jeunes pour qu’ils s’épanouissent. Mais on ne sait jamais, demain peut-être, on aura d’autres ambition mais pour le moment, c’est former les jeunes. On veut créer des talents parce que le Cameroun en a besoin.

Revenant sur le séminaire, quelles sont les conditions pour y participer ?

Le séminaire est ouvert à tout le monde. Les conditions de participation sont simples. Il faut donner 5000 Francs et vous y participez. Les cinq milles, c’est vraiment pour permettre que les instructeurs aient de l’eau à boire pendant le séminaire, c’est juste dérisoire.

Pouvez-vous davantage nous présenter le centre ? C’est combien de jeunes, quelles sont les différentes catégories ?

Pour le moment, on a près de 60 jeunes repartis dans toutes les catégories de 9 à 19 ans. Il y a les moins de 19 ans, les moins de 17 ans, les moins de 15 ans, les moins de 13 ans et l’âge d’or qui est de 9 à 11 ans. Tous les enfants de ces catégories-là, on les recrute et on essaie de les former. Vous savez que la bonne formation commence même un peu plus bas, mais malheureusement, pour le moment, on ne peut pas aller plus bas. On commence à 9 ans et de 9 à 19 ans, on prend tout le monde.

Ces jeunes sont-ils réceptifs ?

On va terminer le séminaire par un petit match le samedi et c’est là où tout le monde pourra juger. Notre objectif, c’est la qualité du jeu, c’est la technique de base, c’est des attaquants bien formés qui dribblent, qui marquent des buts, qui font des passes de but. Donc, c’est ce que nous recherchons, ce que nous essayons d’inculquer à ces enfants. Vraiment, on souhaite qu’ils aient tout ce que ceux que j’ai cités tout à l’heure avaient pour relever notre football. Vous savez, je l’ai dit à un certain moment, notre football a perdu son identité parce que je sais qu’au début de la remontée de notre football les années 78-80, on avait de très bons attaquants, dribbleurs, passeurs, buteurs et des défenseurs grands, athlétiquement et tactiquement biens. Aujourd’hui, je ne sais pas où est-ce qu’on se trouve. Quand je regarde notre équipe nationale, je ne sais pas si on a de bons attaquants dribbleurs, je ne sais pas si on a des défenseurs athlétiques. Ça me gêne et je souhaite qu’on revienne à la base pour recommencer et redonner à notre football son identité.

On imagine que vous avez gardé un œil sur le championnat Elite One, quel commentaire faites-vous sur la qualité des prestations alors qu’il est rendu à la 11ème journée ?

Je vais vous dire sincèrement que depuis le début, je n’ai pas vu de match mais j’ai des échos, je sais que Coton est en tête suivi d’Avion et qu’Union de Douala est regrettable. Mais je dis que c’est dommage parce que ceux-là qui doivent tirer le football camerounais par le haut sont en train de le ramener par le bas et c’est simplement dommage. Je sais aussi que Wome est très engagé avec le Canon et je profite pour lui dire merci parce que si tous les footballeurs se mettent sur le terrain, on va relever notre football. Au lieu de rester seulement à la maison pour attendre les nominations. Mon souhait, c’est qu’ils viennent pour qu’ensemble, on essaie de relever ce football parce que la relève c’est le football jeunes.

 

Coach, vous êtes très attaché à l’actualité de l’Union sportive de Douala. Sur un média récemment, on vous a trouvé très critique vis-à-vis de l’administration du club, qu’est-ce que vous lui reprochez exactement ?

C’est un club que j’aime beaucoup. A l’administration, je reproche le fait que les joueurs et les entraineurs ne sont pas mis dans les meilleures conditions. Or, c’est ce qu’il faut pour que l’équipe ait des résultats. J’ai discuté avec l’entraineur partant, puisqu’ils ont changé d’entraineur, il m’a dit que depuis qu’il est là, il n’a pas de salaire. Quand un entraineur peut faire deux ans sans avoir un salaire, vous attendez quel résultat ? C’est pour cela que je suis amère avec les dirigeants de l’Union. Il faudrait qu’ils mettent les gens dans des bonnes conditions pour que ceux-là donnent le résultat.

A l’exemple de Pierre Wome Nlend, s’il vous était demandé de prendre la direction d’un club, l’Union par exemple, est-ce que vous accepteriez ?

Ça, sincèrement, je n’y ai pas pensé. Mais rien n’est impossible, on a toujours dit qu’il ne faut jamais dire jamais. Donc, tout est possible dans la vie.

Interview réalisée par Léger Tientcheu

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